Tandis que les menaces climatiques et
commerciales s’intensifient, la Commission OMS-UNICEF-The Lancet appelle à
repenser radicalement la santé de l’enfant
19
février 2020
Communiqué
de presse
New
York / Londres / Genève
Source: Organisation mondiale de la Santé
Aucun
pays ne protège de manière appropriée la santé des enfants, leur environnement
et leur avenir, selon les constatations d’un rapport marquant qui est publié
aujourd’hui par une Commission rassemblant plus de 40 experts de la santé de
l’enfant et de l’adolescent venus du monde entier. Cette Commission a sous
l’égide de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), de l’UNICEF et de The
Lancet.
« Malgré des améliorations dans la santé de l’enfant et de l’adolescent au cours des 20
dernières
années, les progrès stagnent et devraient s’inverser », a déclaré Hélène
Clark, ex-Premier Ministre de Nouvelle-Zélande qui co-préside la Commission.
« Selon les estimations, environ 250 millions d’enfants de moins de
cinq ans dans les pays à revenu faible et intermédiaire risquent de ne pas
pouvoir se développer pleinement, d’après les indicateurs relatifs au retard de
croissance et à la pauvreté. Mais ce qui est encore plus préoccupant, c’est que
chaque enfant dans le monde est désormais confronté aux menaces existentielles
que représentent les changements climatiques et les pressions commerciales.
« Les pays doivent transformer leur approche de la santé de l’enfant et de l’adolescent, pour garantir non seulement que nous nous préoccupons de nos enfants aujourd’hui mais aussi que nous protégeons le monde dont ils hériteront demain », a-t-telle ajouté.
L’intensification des changements climatiques est une menace pour l’avenir de chaque enfant
Le
rapport comprend un nouvel index mondial incluant 180
pays, permettant de comparer les résultats pour l’épanouissement de
l’enfant, en incluant des mesures de la survie et du bien-être de l’enfant, qui
s’appuient sur la santé, l’éducation et la nutrition ; de l’environnement
durable, moyennant un indicateur relatif aux émissions de gaz à effet de
serre ; et de l’équité, ou des écarts de revenus. [ Dix premiers et derniers
pays ; Index mondial complet, p. 35-38] [1]
Selon
le rapport, tandis que les pays les plus pauvres doivent faire davantage pour
que leurs enfants puissent vivre en bonne santé, les émissions excessives de
carbone – provenant de façon disproportionnée des pays les plus riches – sont
une menace pour l’avenir de tous les enfants. Si le réchauffement climatique
dépasse 4°Celsius d’ici à 2100, conformément aux projections actuelles, les
conséquences sanitaires pour les enfants seraient dévastatrices, du fait de
l’augmentation du niveau des océans, des vagues de chaleur, de la prolifération
de certaines maladies telles que le paludisme et la dengue, et de la
malnutrition.
L’index
montre que les enfants de Norvège, de la République de Corée et des Pays-Bas
disposent des meilleures chances de survie et de bien-être, tandis que les
enfants de République centrafricaine, du Tchad, de Somalie, du Niger et du Mali
sont ceux pour qui les perspectives sont les plus sombres. Toutefois, lorsque
les auteurs ont pris en compte les émissions de CO2 par
habitant, les pays en tête du classement se retrouvent à la traîne : la
Norvège est au 156ème rang, la République de Corée au 166ème,
et les Pays-Bas au 160ème. Chacun de ces trois pays émet 210% de CO2 de
plus par habitant que ne lui permettra la cible fixée pour 2030. Les États-Unis
d’Amérique, l’Australie et l’Arabie saoudite figurent parmi les 10 pires
émetteurs de CO2.
« Plus
de deux milliards de personnes vivent dans des pays où le développement est
entravé par des crises humanitaires, des conflits et des catastrophes
naturelles, des problèmes de plus en plus liés aux changements
climatiques, » a déclaré Awa Coll-Seck, Ministre d’État auprès du
Président de la République du Sénégal et co-présidente de la Commission.
« Alors que certains des pays les plus pauvres rejettent certaines des
émissions de CO2 les plus faibles, bon nombre d’entre eux sont
exposés aux conséquences les plus néfastes des changements rapides du climat.
Promouvoir de meilleures conditions aujourd’hui pour permettre aux enfants de
vivre et de s’épanouir au niveau national ne doit pas se faire au détriment de
l’avenir des enfants à l’échelle mondiale. »
Les
seuls pays qui sont sur la bonne voie pour atteindre les cibles en matière
d’émissions de CO2 par habitant d’ici à 2030, tout en obtenant
des résultats corrects (dans les 70 premiers) en matière de mesures de
l’épanouissement des enfants sont : l’Albanie, l’Arménie, la Grenade, la
Jordanie, la République de Moldova, Sri Lanka, la Tunisie, l’Uruguay et le
Viet Nam.
Les enfants sont les proies d’un marketing
nocif – l’obésité chez les enfants a été multipliée par onze
Le
rapport met aussi en lumière une autre menace qui pèse sur les enfants :
le marketing nocif. Dans certains pays, les enfants voient, comme le suggèrent
les données factuelles disponibles, jusqu’à 30 000 publicités sur les
seuls écrans télévisés au cours d’une même année, tandis que l’exposition des
jeunes à la publicité pour le vapotage (les cigarettes électroniques) a bondi
de plus de 250 % aux États-Unis au cours des deux dernières années,
atteignant plus de 24 millions de jeunes gens.
Selon
le professeur Anthony Costello, l’un des auteurs membres de la Commission,
« L’autorégulation de l’industrie est un échec. Des études menées en
Australie, au Canada, au Mexique, en Nouvelle-Zélande et aux États-Unis – entre
autres – ont montré que l’auto-régulation n’a pas entravé les capacités
commerciales de faire de la publicité à destination des enfants. Ainsi, en
Australie, malgré l’adhésion de l’industrie à l’auto-régulation, les
spectateurs enfants et adolescents sont toujours exposés à 51 millions de
publicités pour l’alcool en une année de retransmissions télévisées de
football, de cricket et de rugby. Et la réalité pourrait être bien pire encore
puisque nous disposons de peu de données et de chiffres sur l’explosion de la
publicité via les médias sociaux et leurs algorithmes ciblant nos
enfants. »
L’exposition
des enfants au marketing commercial pour la « malbouffe » et les
boissons sucrées est associée à l’achat d’aliments nocifs pour la santé et au
surpoids et à l’obésité, le marketing agressif étant ainsi lié à l’augmentation
alarmante de l’obésité chez l’enfant. Le nombre d’enfants et d’adolescents
obèses, qui étaient 11 millions en 1975, est passé à 124 millions en 2016 – et
a ainsi été multiplié par onze, avec des coûts catastrophiques pour les
individus comme pour la société.
Un manifeste pour une action immédiate en
faveur de la santé de l’enfant et de l’adolescent
Pour
protéger les enfants, les membres de la Commission indépendante appellent à un
nouvel engagement mondial, en faveur des enfants et guidé par ceux-ci. Leurs recommandations sont notamment les
suivantes :
recommandations sont
notamment les suivantes :
1.
Mettre un terme aux émissions de CO2 de
toute urgence, pour garantir que les enfants aient un avenir sur cette
planète ;
2.
Placer les enfants et les adolescents au
centre de nos efforts pour parvenir à un développement durable ;
3.
Inciter tous les secteurs à élaborer de
nouvelles politiques et à investir dans les domaines de la santé et des droits
de l’enfant ;
4.
Intégrer la voix des enfants dans le
processus de décision politique ;
5.
Renforcer la réglementation du marketing
commercial nocif au niveau national, en s’appuyant sur un nouveau protocole
facultatif à la Convention des Nations Unies relative aux droits de
l’enfant.
Le
Dr Richard Horton, rédacteur en chef des publications du
groupe The Lancet a déclaré : « L’occasion est
exceptionnelle. Les données sont disponibles. Les outils sont à portée de main.
Aux chefs d’État comme aux autorités locales, aux dirigeants des Nations Unies
et aux enfants eux-mêmes, cette Commission lance un appel en vue du passage à
une nouvelle ère pour la santé de l’enfant et de l’adolescent. Il faudra du
courage et de la volonté pour arriver à des résultats. C’est le test suprême
pour notre génération. »
« Qu’il
s’agisse de la crise climatique, de l’obésité ou des pratiques de marketing
nocives, les enfants du monde entier doivent combattre des menaces qui étaient
inimaginables il y a seulement quelques générations », a déclaré Henrietta
Fore, Directrice générale de l’UNICEF. « Il est temps de repenser la santé
de l’enfant, pour placer les enfants au premier rang des priorités de tout
programme de développement gouvernemental et leur bien-être au-dessus de toute
autre considération. »
« Le
présent rapport montre que les décideurs du monde entier échouent, trop
souvent, lorsqu’il s’agit des enfants et des jeunes : échouent à protéger
leur santé, échouent à protéger leurs droits, et échouent à protéger leur
planète », a déclaré le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus,
Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé. « Ce rapport
doit servir d’avertissement pour que les pays se décident à investir dans la
santé de l’enfant et de l’adolescent, veillent à ce que leur voix soit
entendue, à protéger leurs droits, et à construire un avenir qui soit digne des
enfants. »
Notes aux rédacteurs
[1]
À propos de l’index : voir p. 35 à 38 du rapport, les explications techniques
figurant en annexe, pp. 19-72.
[2]
Cette Commission a été financée par la Fondation Bill & Melinda Gates.
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